Estagel

Estagel Pyrénées-Orientales Occitanie

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À l'ouest du petit village de Calce, cap sur la commune d'Estagel. Dernière ville de langue catalane du nord-ouest des pays catalans, son territoire s'étend du Mont d'Estagel et la Serra de la Gironella au nord jusqu'aux premiers contreforts du massif de Força Réal. 
S'écoulant vers le sud, la rivière du Verdouble  vient se jeter dans le fleuve Agly  qui traverse le territoire de la commune d'Estagell d'ouest en est.
Sur les terres d'Estagel au cœur de la vallée de l’Agly, les paysages de vignes alternent avec la garrigue, entrecoupés de nombreux chemins de randonnée. 



Estagel est elle aussi une ville-étape du train rouge du Pays Cathare et du Fenouillèdes qui sillonne le long de l'Agly. 



Les terres d'Estagel furent occupées dès le paléolithique comme l'attestent les éléments retrouvés dans une grotte sur la rive gauche de l'Agly lors de la construction du réseau chemin de fer sur la commune en 1891. Des ossements humains, mais aussi de renne ainsi que quelques fragments de céramiques y furent découverts. 

Un peu plus tard, les Romains s'y installeront, laissant quelques traces de leurs passages notamment au Mas de Jau et au Mas Camps. 

Entre le  5e et le 7e siècle, les Wisigoths occuperont la région, et laisseront derrière eux à Estagel, un cimetière de plus de deux cents tombes. Classé monument historique depuis 2005, des campagnes de fouilles y furent organisées dans les années 1940. Il était situé au lieu-dit " Las tombas" au sud-ouest de la ville.

Dans un méandre que forme le Verdouble dans la partie nord du territoire d'Estagel, la présence du site "El cementiri dels Moros" laisse à penser que les Maures sont eux aussi venus s'y installer sans que cela puisse être attesté.



Mentionné pour la première fois sous la forme de "Stagello" en 806, le village d'Estagel prendra naissance au cours du 10e siècle, en 951 autour de son église paroissiale Saint-Étienne ~ Sant Esteve. Possession de l'abbaye de Lagrasse, elle le restera jusqu'à la Révolution Française. La cellera sera fortifiée au cours du 13e siècle. De nos jours seuls subsistent quelques pans de murs, et  l'ancienne porte devenue Tour de l'horloge.




Parallèlement au développement de la cellera d'Estagell, en 1100 sera construite sur les hauteurs du village, la petite église  "Sancti Vicentii de Stagello". D'origine préromane, l'édifice est à nef unique et fût converti en ermitage au cours du 17e siècle et le restera jusqu'à la Révolution Française.  Accessible depuis le village,   la chapelle Saint-Vincent est un lieu de culte, mais aussi un lieu convivial à l'ombre des oliviers et des pins avec un panorama imprenable sur le village et le Canigó. 



En 1258 lors de la signature du traité de Corbeil, le Fenouillèdes sera rattaché au royaume de France et Estagell deviendra ville frontière.

En 1542, lorsque François Ier, roi de France, tenta de reprendre le Roussillon, le village d'Estagel sera pillé et l'enceinte de la ville ainsi que l'église d'origine romane Sant Esteve, brûlées. 
Elle sera par la suite restaurée à plusieurs reprises notamment au 17e siècle avec l'ajout de ses chapelles latérales. Au 18e siècle, son clocher de style baroque espagnol fut ajouté. De nos jours, dédiée à Saint-Étienne et à Saint-Vincent, elle renferme différents retables, dont celui  de la chapelle du Rosaire daté de 1713, classé au titre objet depuis 1911.




Jusqu'au Traité des Pyrénées en 1659, Estagel verra à de nombreuses reprises le passage de troupes françaises, espagnoles, et subira aussi de nombreuses attaques telles que celle qui en 1639 opposera les habitants du village aux troupes françaises. Un calme relatif s'installa à la signature du traité en 1659.



En 1910, les vignerons d'Estagel créeront La Cave Coopérative Agricole de Vinification Aglya. Des années plus tard riches de leurs différents terroirs ceux sont 250 viticulteurs cultivant près de 1 150 ha sur les communes d'Estagel, Montner, Lesquerde, Saint-Paul-de-Fenouillet et Caudiès, qui se sont regroupés pour former "Les Vignerons des Côtes d'Agly".



Au cours du 18e siècle naîtra un illustre personnage qui marquera à jamais l'histoire d'Estagel, mais aussi le monde des sciences et de la politique.



Dominique François Jean Arago, fils aîné de François Bonaventure Arago, propriétaire terrien, et maire d'Estagel, naquit le 26 février 1786 à Estagel. 
Éblouissant son examinateur, le mathématicien Gaspard Monge, il intégrera à l'âge de dix-sept ans, l'École polytechnique en 1803.



Par ses contributions à la physique et à l'astronomie, ainsi que par ses talents de vulgarisateur, François Arago marqua de son empreinte le développement scientifique du 19e siècle. 
Ses travaux portèrent sur la nature et la vitesse de la lumière, le magnétisme, la polarisation. Il parvint à déterminer le diamètre des planètes et participa à des travaux sur la vitesse du son.
Il participa notamment  au relevé du méridien de Paris en 1806, cette ligne imaginaire qui va d’un pôle à l’autre, avant qu'en 1885 un accord international ne décide que le méridien de l’observatoire de Greenwich en Grande-Bretagne devienne le méridien de référence. 



Il fut aussi une figure de la politique, aux convictions républicaines affichées, qui milita pour le progrès technique et le progrès social.
Institué en France pendant la Révolution française, le suffrage universel reconnaissant le droit de vote à l'ensemble des citoyennes et citoyens, fut supprimé par le Directoire en 1795.
Dès le 16 mai 1840,  il s’exprima fortement en faveur du suffrage universel lors d'un discours sur la réforme électorale.
« Il est donc utile, il est donc juste que les classes qui actuellement sont privées des droits politiques viennent les réclamer. »
Il fallut attendre le 5 mars 1848 pour que le  suffrage universel masculin soit rétabli pour tous les hommes de nationalité française, âgés de 21 ans ou plus, et jouissant de leurs droits civils et politiques. Le nombre de votants passa  alors de 246 000 à plus de 9 millions.



En février 1848, chargé de diriger les ministères de la Marine et de la Guerre, il promulgua le décret abolissant l'esclavage dans les colonies françaises. 
L'astronome, physicien et homme politique, de par ses convictions refusa de prêter serment de fidélité à Louis-Napoléon Bonaparte et quitta la vie politique après le coup d'État du 2 décembre 1851.
Presque aveugle et miné par le diabète, il s'est éteint en 1853 âgé de 67 ans.



À Estagel, un premier monument lui rendant hommage réalisé par le sculpteur Alexandre Oliva de Saillagouse fut installé  sur la place en 1865. Victime des troupes allemandes en 1942, qui récupèrent le bronze pour le fondre, ce n'est qu'en 1957 qu'il sera remplacé par une nouvelle statue oeuvre du sculpteur Marcel Homs de Céret.

À Paris, l'histoire se répéta. La statue de François Arago inaugurée en 1893, quarante ans après sa mort par Raymond Poincaré sur la  place de l’Ile-de-Sein, fut délogée de son socle puis fondue par les Allemands pour fabriquer des canons. Une nouvelle sculpture fut inaugurée en 2017, dans les jardins de l'Observatoire de Paris sur le tracé du méridien de Paris qu'il a contribué à relever.



Toujours à Paris, une autre forme d'hommage lui fut rendue en 1994. Celui des 135 médaillons de bronze portant en leur centre le nom « Arago » qui sont disséminés dans le sol parisien et alignés le long du méridien de Paris. Une référence à cette œuvre baptisée "L'Hommage à Arago" est apparue en 2003 dans le roman "Da Vinci Code" de Dan Brown.


Il fait aussi partie de la liste des 72 noms de savants que Gustave Eiffel fit graver en lettres d'or sur le premier étage de la tour Eiffel pour avoir honoré la France de 1789 à 1889.  Il apparait en 16e place  sur la face nord-est de la tour Eiffel.



Dans le département de nombreux lycées, rues, places portent son nom, mais aussi plus atypique, le petit refuge Arago sur les pentes du Canigó à 2121 m d'altitude. Il est dit que le doigt levé de la statue de François Arago située Place Arago à Perpignan pointe la direction du Canigó et du refuge.